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AU NOM DE QUELLE FOI?

L’ORIENT LE JOUR 03/01/2014

Au nom de quelle religion le Proche-Orient est-il en train de sombrer ? Au nom de quelle foi le croissant fertile est-il en train de dépérir ?
Le but de la religion est de nous réunir avec Dieu ; se peut-il que le but de Dieu soit de nous détruire ?
Comment peut-on se dire croyant, et croire en ce que l’on dit, lorsqu’on invective la communauté d’en face à coups de violence, d’agressivité et de propos haineux ?
Comment peut-on, au nom du christianisme, de l’islam ou du judaïsme, s’engager sur la voie opposée à celle qui nous mène au Dieu dont nous nous réclamons ?
Comment peut-on accepter que soit appliqué aux autres communautés ce que nous jugeons inacceptable pour nous-mêmes, nous autorisant par ce biais à les combattre avec force et véhémence ?
Dans nos soi-disant luttes de convictions, nous croyons arborer sur nos drapeaux le symbole de la croix, du croissant ou de l’étoile de David. En réalité, nous affichons tous la même bannière, celle des pirates, avec, comme inscriptions, le crâne de la mort et les ossements des victimes. Nous avons piraté jusqu’à notre propre Dieu. En son nom nous pratiquons ce que nous dictent notre propre volonté, notre orgueil et, somme toute, notre ignorance.
Jusqu’à quand allons nous alourdir le poids de la croix, réduire en miettes les Tables de la loi, et assassiner les califes de la foi ?
Trois religions monothéistes, trois religions proclamant un seul Dieu, et ce Dieu ne serait pas le même ? Comment peut-on faire preuve d’une telle cécité ?
En réalité, Dieu n’est qu’un prétexte politique. Chaque communauté l’utilise pour faire ce qui l’arrange. Et ce qui l’arrange, c’est de démontrer qu’elle est la meilleure, la plus forte, qu’elle seule est dans le vrai. Par conséquent, elle considère que son Dieu est le meilleur, le plus fort et que lui seul est dans le vrai. De fait, de par notre volonté propre (et non celle de Dieu), nous rendons notre Dieu différent de celui des autres et nous combattons les autres en son nom.
Au nom de la religion, nous méprisons d’un côté les athées, qui, à juste raison, en ont assez des atrocités commises au nom de Dieu. Et, de l’autre côté, nous restons solidaires de nos fanatiques, qui, tout en prétendant se battre pour gagner le paradis et le salut de leurs âmes, instaurent un enfer sur terre et détruisent l’âme de leurs compatriotes.
La politique citoyenne devrait être soumise au filtre de notre croyance et en être la conséquence et l’application naturelle. Tandis que nous autres, nous aliénons notre religion et la déformons pour la faire tenir dans le moule obtus de nos hantises politiques.
Dans nos luttes intestines, humano-humaines, nous délaissons les enseignements de Dieu, supposés donner un sens à notre vie, puis nous nous plaignons que notre Dieu à nous, celui que nous pensons aimer de toute nos forces, ne nous vienne pas en aide.
Celui qui naît au sein d’une communauté n’a aucun mérite personnel que je sache. Croit-il vraiment qu’il est supérieur aux autres ? Et si, par hasard, sa maman était tombée amoureuse d’un homme d’une autre communauté, cela aurait-il fait de lui un être humain de deuxième zone ? Comment peut-on encore soutenir et colporter ce genre d’inepties ?
Comment peut-on suivre aveuglément des leaders corrompus jusqu’à la moelle, uniquement parce qu’ils sont de notre communauté, alors qu’ils parlent au nom d’une religion dont ils piétinent les sacrements les plus simples et les enseignements les plus élémentaires ?
Nous voulons nous entre-tuer, soit. Mais arrêtons de le faire au nom de Dieu, censé, quelle que soit la religion, nous octroyer la vie, la joie, la paix et la fraternité.
Nous prétendons suivre Dieu, sauf que nous avons réglé notre GPS sur la piste du diable. Or les démons sont légion et l’endroit de Dieu est unique. C’est ainsi que nous nous fourvoyons, que nous nous isolons les uns des autres, au lieu de nous retrouver, tous ensemble, dans le sein de notre unique Créateur.
Que toute personne qui tient ce journal entre ses mains se déleste un instant de sa peur primitive, s’arme de la foi dans laquelle elle est née, rentre en elle-même et se demande : « C’était quand, la dernière fois où j’ai conversé avec mon Dieu, en connaissance, en justice, en amour et en foi ? Ne m’aurait-il pas confié, il y a déjà bien longtemps, qu’il est le Dieu des chrétiens, des juifs et des musulmans? »

Published inLIBAN

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